Pollution et environnement : la résilience de nos cellules menacée…
Divers mécanismes protègent nos cellules des stress variés qu’elles subissent, nous prémunissant des maladies. Toutefois, divers indices semblent indiquer que ces capacités de résistance pourraient être menacées.

Le vivant est en permanence confronté au stress cellulaire. La réponse au stress cellulaire (notamment lors du développement et de la reproduction) est un garant d’adaptation et d’expansion d’une population donnée. Un stress faible peut stimuler la longévité des cellules. Cependant, un stress excessif, par exemple sous l’effet de facteurs environnementaux, peut éroder les capacités de résilience cellulaire. Or, l’érosion de ces capacités est au centre du vieillissement des tissus. C’est un risque « corps entier », car les organes communiquent entre eux. Par exemple, le microbiote intestinal communique avec le cerveau et son altération peut être préjudiciable au cerveau. C’est un risque « vie entière », car la réussite de la réponse au stress cellulaire traite des phases critiques de l’existence comme la reproduction (taux de natalité), la grossesse (santé du fœtus) ou le développement de l’enfant. Dans un tel contexte, éviter que les pratiques industrielles érodent toujours plus nos capacités de résilience cellulaire est une responsabilité qui oblige tous les acteurs concernés, et cette responsabilité est proportionnelle à la puissance des acteurs. Mais comment prendre en compte ce risque majeur ?
Changer de paradigme ?
À l’heure actuelle, on estime la résilience individuelle contre la survenue ou la progression d’une maladie à partir du poids, plus ou moins important selon les personnes, des facteurs de susceptibilité. Ceux-ci ne sont pas biologiques stricto sensu, mais souvent comportementaux (tabagisme, alcoolisme), conjoncturels (proximité d’une usine, solitude) ou socioprofessionnels (revenus, mobilité). Cependant, l’absence d’un facteur de susceptibilité ne signifie pas forcément que l’on soit résilient.
L’enjeu, aujourd’hui, est de réduire les maladies chroniques de façon globale, et de sortir des réponses ponctuelles. Or, le modèle actuel, focalisé sur les « maladies avérées », limite la portée de la prévention et l’anticipation des coûts sociétaux. En effet, les coûts cachés sont sous-évalués, voire ignorés. Cette nécessaire transformation est cependant entravée de diverses manières (monopoles, lobbying industriel, accords bilatéraux, désinformation, manipulations des études, relégation au second plan des questions de santé, priorités budgétaires, ou encore sous-dimensionnement des acteurs de la vigilance…). Ces obstacles limitent notre capacité à adopter une politique santé-responsable, alors même que le dépassement des capacités de résilience cellulaire pourrait s’inscrire dans un modèle de risques « en chaîne », les pollutions chimiques s’accompagnant d’une santé figée à un niveau médiocre, résultant en des coûts systémiques accrus.
Références :
Christian Neri
Directeur de Recherches INSERM, Inserm
Lire l’article dans son intégralité 24.